Comme je l’avais écrit dans l’article sur Idenix, la stratégie “gourous” consiste à suivre les idées d’un investisseur qui a fait ses preuves et qui a une stratégie à laquelle on adhère.
J’applique de nouveau ici cette stratégie.
Ma méthode est on ne peut plus simple, voici le détail :
- allez sur un site qui donne des informations sur les gourous. Personnellement j’utilise gurufocus.com.
- choisissez le gourou avec les deux qualités citées. Reprenons Seth Klarmann, gérant du hedge fund The Baupost Group. De 1983 à 2008, ce fonds a retourné 16,5% l’an, net de frais, à ses clients ((http://www.forbes.com/2010/02/24/enzon-facet-nws-markets-intelligent-investing-seth-klarman.html)).
- vérifiez que son portefeuille est concentré. Cela indique qu’il est sûr de ses investissements. A défaut, ne considérez que les lignes significatives du portefeuille (par exemple 10 %). Le portefeuille de Baupost peut être qualifié de concentré puisqu’il contient à ce jour 24 lignes.
- regardez préférentiellement les premières lignes de son portefeuille (par exemple celles qui représentent au moins 10 %). Avec Klarman, cela donne 4 valeurs : MU, IDIX, VSAT, THRX.
- regardez ses derniers achats faits à un prix si possible supérieur au cours actuel, ou au moins à un prix peu différent. Vérifiez qu’il n’y pas eu, depuis l’achat, de dividende spécial, de spin-off ou autre changement majeur dans la société. Klarman a commencé à vendre MU, IDIX et (un peu) THRX. Par contre VSAT a été acheté à un prix moyen supérieur au cours actuel.
- prenez alors l’intersection de ces deux derniers ensembles. Il ne reste que VSAT.
- c’est fini !
En l’occurence, Klarman a continué à acheter Viasat (VSAT) à 60 $ de moyenne (entre 54 et 70 $) au 2e trimestre 2014. Cette position est la troisième de The Baupost Group et fait 10 % de son portefeuille. On peut même considérer que c’est la première idée de Klarman actuellement : la deuxième position du portefeuille, Idenix, est déjà virtuellement vendue ; et il s’est allégé sur la première.
Considérant cela, j’ai initié en juin une petite ligne à 57,54 $.
“Hein !? tu ne sais rien d’autre sur la société, tu ne fais aucune analyse !?”
Hé bien non. Un des plus grands investisseurs value a mis 10 % de son fonds dans cette société. Même en fouillant de fond en combles les rapports annuels et les autres informations disponibles, que vais-je découvrir que Klarman (et son équipe) n’aurait pas vu ? Selon moi : rien du tout ! Passer plus d’énergie sur le sujet serait pour moi une perte de temps. Bien sûr c’est une position que je pourrais reconsidérer si un jour je découvre que je suis immortel… Je préfère passer du temps à analyser des small caps qui ne sont suivies par aucun gérant.
“On peut parler un peu de Viasat quand même ?”
Oui, mais rapidement parce que Laurent l’a déjà bien décrite sur son joli blog. Viasat est une entreprise de communication US qui fournit des équipements et services de communication à la fois militaires et civils. Cela concerne principalement les technologies liées aux satellites et les connexions internet haut-débit. Typiquement cette technologie vous sert (ou servira) à téléphoner en avion. Voici un de leurs satellites, Viasat-1 :
(la couverture des satellites Viasat 1 et 2 est dans l’image d’entrée de l’article). Laurent a tenté une valorisation de la société. Personnellement je n’en ai aucune idée. Il me suffit de savoir que je l’ai payée le même prix que Klarman.
Par contre je peux facilement imaginer que le potentiel de développement d’une telle entreprise peut être important.
JL – octobre 2014.
Epilogue
J’ai vendu cette société en 2016 environ 1,5 ans après l’achat avec une PV = +6 %. A ce moment-là, j’avais mieux à faire avec mon argent. Cela m’a permis de stocker quelques dollars pendant 1,5 ans…
JL – 5 juillet 2018.
Tout à fait d’accord avec cette approche car les pros on etudié le dossier de font en comble, peut etre meme avec une équipe, donc analyser soit meme uniquement et sans se baser sur le guru serait irrationel, a moins d’y passer 2 mois.
Il faut quand meme regarder le business model pour le comprendre et voir si cela nous parle. Par exemple Tesco a ete achete par un Guru mais l’experience terrain me faisait douter de l’existence d’un moat preservant les marges
D’accord avec cette démarche…en y rajoutant un peu de feeling….j ‘ai aussi sauté mon tour avec Tesco dont Buffet reconnait que c’était une grosse erreur…je compléterais la démarche en allant aussi regarder les autres sociétés du secteur juste pour me faire une idée…Merci pour ce très intéressant ( et élégant ) blog…
Géniale cette démarche ! Niveau feeling, le mien est négatif sur Viasat mais je n’ai aucun argument pour me défendre, juste le secteur qui m’intéresse peu. Du coup je passe mon tour mais vous me donnez bien envie de faire une petite extraction de titres “Guru”, juste pour l’intérêt intellectuel et mécanique.
Merci à tous pour vos remarques.
“géniale” est un peu exagéré peut-être :-), “pragmatique” plutôt ?
espenlind13, n’hésitez pas à revenir nous faire part de vos recherches gourous !
Cette démarche me semble également intéressante, mais n’est ce pas contradictoire avec “leprojetlynch” ? Peter Lynch recommande en effet plusieurs fois dans son livre de ne jamais écouter ou faire confiance à un professionnel. 😉
(Désolé pour ce petit commentaire, je suis également tenté par Viasat)
Bonne question Guillaume.
On peut faire confiance à Lynch n’est-ce pas ? Pourtant il était professionnel. C’est donc qu’il y a des exceptions à la règle. CQFD 🙂
D’ailleurs lui-même écrivait :
“Bien sûr, tous les professionnels ne sont pas comme cela. Il y a d’excellents gérants, des gérants à l’esprit innovateur et des francs-tireurs qui investissent comme bon leur semble.”
JL
Tout à fait d’accord.