Après l’analyse de Xilam, voici celle d’une autre société qui sort du cadre deep value, une société de croissance, HighCo. Et surtout, nouveauté, nous avons un invité : après avoir déniché et analysé cette société fort intéressante, Geronimo a accepté de publier un article commun. Geronimo est un participant actif, et que je considère comme l’un des meilleurs, du forum de l’IH. Aussi est-ce un honneur de le recevoir sur ce blog.
Présentation de la société
HighCo est un groupe de publicité et de communication spécialisé dans l’influence du comportement du consommateur. Il est présent dans 15 pays avec environ 800 collaborateurs. Une grosse partie de l’activité se fait toutefois en France (60 % environ).
Après quelques années difficiles, l’horizon s’éclaircit : la croissance semble être bien revenue (9 trimestres consécutifs, +15% par an). Elle s’achète aujourd’hui à un EV/FCF correct, qui pourrait ouvrir une opportunité d’achat intéressante en cas de baisse ou de bons résultats.
A la date d’analyse, la capitalisation boursière était de 82 M€ = 7,85 €/action x 10, 4 millions d’actions (11,2 M au total moins 0,8 M auto-détenues).
La société verse actuellement un dividende de 0,15 €/action, soit environ 2 % de rendement au cours actuel.
De 2005 à 2011, la société a régulièrement intéressé ses cadres dirigeants et salariés au capital de l’entreprise, jusqu’à un peu plus de 943 000 actions. La moitié a été annulée ou est caduque, l’autre moitié est encore disponible. Il n’y a pas eu de plan d’attribution d’actions depuis.
L’entreprise rachète régulièrement ses actions, notamment depuis le printemps 2015 avec un rythme hebdomadaire élevé (2000 actions environ, et même jusqu’à plus 4000 actions/semaine en fin d’année). Les objectifs affichés pour ces rachats d’actions sont la croissance externe et l’annulation (autorisée par l’AG de juin 2015, mais aucune annulation n’a encore eu lieu à ma connaissance).
Enfin, HighCo est une filiale à 34 % du groupe WPP France Holdings qui dépend lui-même du groupe WPP, l’un des plus gros groupes de marketing et communication au monde (http://www.wpp.com/wpp/companies/).
Passons aux éléments d’analyse
Nous nous basons sur les chiffres du dernier rapport semestriel (30/06/2015).
Bilan :
Principaux actifs tangibles | Million € | €/action |
Actifs non-courants tangibles Créances clients Quasi-cash(*) Cash |
7,1 47,6 19,0 54,1 |
0,68 4,58 1,83 5,20 |
Principales dettes | ||
Dettes financières Dettes fournisseurs Autres dettes |
15,9 35,8 84,3 |
1,53 3,44 8,11 |
(*) autres actifs courants nets et lignes en dessous (plus liquides) : créances d’impôts et créances fiscales.
A l’actif, une part importante du cash (45 M€ -soit 4,32€/action- sur les 54 M€) est issue du BFR négatif de l’activité de coupons. Cette ressource est quasi-permanente pour l’entreprise, mais ne peut être considérée comme « libre ». Nous considérons donc que la trésorerie libre est de 9 M€.
Comme on le voit, la thèse d’investissement ne porte donc pas sur l’existence d’une VANN ou VANT particulièrement intéressante.
Cashflows :
Ces valeurs portent sur la demi-année seulement :
Million € | €/action | |
Cashflows opérationnels Variation du BFR(*) |
5,5 3,9 |
+ 0,53 + 0,37 |
Investissements | -0,8 | – 0,07 |
FCF hors variation du BFR FCF avec variation du BFR |
4,7 8,6 |
+ 0,46 + 0,83 |
(*)Le BFR de HighCo diminue d’une année sur l’autre. La convention du tableau de flux de trésorerie est, dans ce cas, de l’indiquer avec un signe positif car cela impacte positivement la trésorerie.
On remarque ici avec intérêt que la variation du BFR génère du cash alors même que l’entreprise est en croissance (CA mi-2013 : 63 M€ vs CA mi-2014 : 73 M€, soit +15 %). En général, on constate plutôt l’inverse. Ceci est notamment dû à l’activité couponing, qui permet à l’entreprise de fonctionner en BFR négatif.
Ainsi, la croissance de l’activité n’est financée ni par l’actionnaire, ni par le créancier… mais par les clients directement ; c’est idéal (on retrouve ce cas par exemple dans l’assurance ou dans la grande distribution).
Les investissements sont faibles, ce qui est attendu pour une entreprise principalement de services.
Étudions un peu les ratios sur l’activité
Quel peut bien être le FCF normalisé hors variation du BFR ? Les S1 de 2014 et 2015 se ressemblent donc on pourrait calquer les CFO 2015 sur 2014 soit 8 M€. D’un autre coté, un très bon S2 a été prévu pour 2015, on pourrait aussi doubler celui du S1, soit 11 M€. Pour le CAPEX, prenons 2 M€ (2 fois celui du S1). Cela donne un FCF entre 6 et 9 M€.
Le premier ratio que l’on peut calculer, P/FCF ressort entre 9 et 14 soit entre 7 et 11 % de taux de rentabilité.
Calculons plutôt la valeur d’entreprise (EV) au lieu de la capitalisation. Pas facile de savoir ce que cette notion signifie exactement pour cette société à qui le cash n’appartient pas vraiment. Nous avons fini par arriver à la même conclusion que la définition qui semble “standard” :
- EV = capitalisation + dettes financières – cash et équivalents + max(0,dettes opérationnelles courantes – actifs opérationnels courants).
L’idée est que si les actifs courants sont supérieurs aux dettes courantes, ça ne coute rien (ici, nouvelle orthographe) de les acheter, alors que dans le cas inverse oui. Pour HighCo, le dernier terme est positif et cela revient alors à :
- EV = capitalisation + dettes financières non courantes – fonds de roulement = 88 + 13 – 0 = 101 M€.
Au final, on a un EV/FCF compris entre 11 et 17 : pas délirant pour une société en croissance. Avec cette croissance, et un tel BFR, 11 ne serait pas cher, 17 serait probablement un prix correct.
Enfin, notons que la société est depuis juillet 2015 dans le portefeuille du fonds Indépendance et Expansion, probablement l’un des meilleurs fonds value de la place.
Conclusion
In fine, nous pensons qu’il faut peut-être attendre une meilleure connaissance du cash-flow pour savoir si la société est bien valorisée. Ou une baisse du cours.
La grosse cerise sur le gâteau ici est que la croissance s’accompagne d’une diminution du BFR, mais nous n’avons pas tenu compte de cet avantage dans notre valorisation, tout simplement car nous ne savons pas exactement comment le faire.
Nous avons été brièvement actionnaires de HighCo et avons revendu après deuxième analyse.
Geronimo et JL – 11 février 2016.
Mise à jour
Courant 2016, après cet article, le nombre d’actions a doublé par attribution d’actions gratuites. Pour faire des comparaisons avec les cours actuels, il faut donc diviser par deux les cours de cet article.
JL – novembre 2016.